« C'est fou la quantité et la
qualité littéraire proposées à la jeunesse dans ce pays. »
Illustration inédite, La maison est en carton |
Régis Lejonc est un touche-à-tout prolifique, polyvalent et autodidacte, comme il aime le rappeler. Passionné par son métier, il entretien une relation intime avec le dessin, avec l'illustration jeunesse. Coup de chance pour nous, il aime en parler ! Retour sur l'interview du 8 janvier sur les ondes de Radio Escapades et zoom sur les 10 mots qu'il a choisi pour se décrire.
Portrait en 10 mots
Kawaï
« Quelque chose de gentil, de bon et d'immédiat. »
Gentil et mignon, Régis Lejonc ?
Lui, certainement... mais ses dessins ? La forêt sombre de Cœur
de bois, les houles envoûtantes du Phare des sirènes, et la
violence oppressante de Téhéran dans Le jardin du dedans dehors
laisseraient penser le contraire... De l'autre côté, nous recevons
la poésie colorée de Tu seras ma princesse avec plaisir, nous
parcourons paisiblement, entre deux souvenirs et coups de rires les
pages de Quelles couleurs ! et Ma voisine est amoureuse est une
douce promenade qui se lit et se relit. Alors, qu'en dit-il, Régis
Lejonc ? Pourquoi Kawaï ?
Tu seras ma princesse |
« Ça a un côté très enfantin mais, en réalité, derrière cette notion, il y a la volonté de faire passer quelque chose de gentil, de bon et d'immédiat. C'est un style graphique qui me plaît énormément parce que c'est un équilibre de formes. J'en glisse régulièrement dans mes images même si la tonalité générale des illustrations n'est pas proprement kawaï. »
Images
« Je suis passionné par la construction de l'image mais aussi, en tant que lecteur, par toujours découvrir de nouvelles formes... »
Elles sont omniprésentes et, au lieu
de les considérer comme des éléments acquis et banal de notre
civilisation, Régis Lejonc se pose beaucoup de questions sur les
images.
« Quand l'image est créée de toutes pièces, elle est pensée, elle est architecturée d'une certaine façon et tout ça me passionne toujours autant même si, quand j'étais enfant, évidemment, je ne le réfléchissais pas de cette manière. Les images sont très importantes dans ma vie. »
« Je pense que c'est quelque chose qu'on partage tous, quand on lit une histoire sans image ou quand on nous lit une histoire, on se formule des images mentales. Je réfléchis beaucoup à ça : ces images ne viennent pas de nulle part, c'est-à-dire que l'histoire réveille des images qui était déjà à l'intérieure de notre tête. »
Amitié
« J'ai la chance de travailler quotidiennement avec mes amis. »
Lorsque l'on regarde attentivement la
bibliographie de Régis Lejonc, on se rend bien compte que certaines
collaborations reviennent régulièrement. Et c'est souvent pour
notre plus grand plaisir. Ainsi, dans nos albums préférés, aux
Eclats de lire, il y a bien sûr ceux que Régis Lejonc co-signe avec
Henri Meunier, notre invité en 2016. Une forte amitié semble lier
ces deux grands noms de la littérature jeunesse. C'est qu'ils ont
longtemps travaillé dans le même atelier, à Bordeaux.
« Quand on a la chance de partager, en plus de ce qui nous unit par un sentiment de cœur, une passion commune, je trouve que c'est extrêmement nourrissant. »
Histoires
« Je pense que c'est indispensable à notre évolution personnelle, collective... les histoires nous nourrissent tous. »
Pensez à toutes les histoires qu'il a
illustré ou inventé et savourez le bonheur que vous avez de ne les
avoir pas toutes découvertes encore ! Pour Régis Lejonc, les
histoires sont capitales à notre évolution, à notre
apprentissage...
« Ça fait partie de notre nature humaine et on en a un besoin permanent, quelque soit l'âge. »
« Les histoires sont des façons de comprendre le monde, de se comprendre soi, de comprendre les autres. J'aime beaucoup ce constat de la dynamique du lecteur. C'est à dire que quand on lit on n'est pas passif du tout, quand on reçoit une histoire on la nourrit avec nos propres émotions. On la reçoit tous de manière individualisée et personnelle. C'est une richesse infinie. »
« Je suis toujours très triste de croiser, ou de me rendre compte que des enfants ne bénéficient pas d'histoires de leur familles ou dans les conditions sociales dans lesquelles ils vivent. Ça c'est des choses qui m'attristent profondément, toujours. »
Arbres, Oiseaux et Filles
Cœur de bois |
« C'est ce que je préfère dessiner. »
La rue qui ne se traverse pas
Le petit chaperon rouge |
« Dans l'ordre ce que je préfère dessiner ce sont les filles, les oiseaux et les arbres. » (rires)
Le phare des sirènes |
Joie
« C'est une quête quotidienne. »
On l'avait dit, il
aime son métier ! Ce mot, joie, l’emmène dans une nouvelle
ode de son travail, de la littérature jeunesse, de la médiation du
livre...
Même s'il est conscient des
difficultés du secteur, il s'estime chanceux car il a un métier qui
lui « procure de la joie ».
« La joie de pouvoir créer et de raconter des histoires et surtout de les partager à travers les rencontres, les publics, les salons, les Eclats de lire au Vigan en étant un qui est plutôt très, très, réussi en plus. Voilà, je trouve qu'il y a quelque chose de très joyeux dans cette chaîne de la création de l'édition littéraire jeunesse et cette joie en étant actuelle, elle est bien précieuse. »
Spectacle
Avec Régis Lejonc, les œuvres
littéraires ne s'arrêtent pas au livre ! Ainsi, aux Eclats de
lire, on vous propose deux lectures musicales dessinées avec cet
illustrateur.
L'une autour de Tu seras ma princesse,
le magnifique album écrit par Marcus Malte. L'autre est une co
création, avec Annie Agopian, Tout (ou presque) sur les bisous
volants. Cette fois-ci il s'agit d'un spectacle avant d'être un
album. Une conférence douce et drôle pour expliquer aux petits les
baisers qu'on envoie du bout des doigts.
⧫⧫⧫⧫⧫⧫
« Les bisous volants voyagent sur les courants d’air.
On ne les voit pas. On sent juste quand ils se posent.
Même invisibles, les bisous volants font tout de suite du bien.
C’est à ça qu’on les reconnaît. »
Tout (ou presque) sur les bisous volants est un texte inédit, écrit et lu par Annie Agopian. Il est illustré par Régis Lejonc et accompagné par trois musiciens qui en ont créé la musique originale. Cette lecture s’adressent à tous, de 4 ans à 104 ans. Elle prend la forme d’une conférence faussement sérieuse illustrée d’images colorées et de multiples jeux de transparences, et ponctuée de chansons. Catalogue fantasque de cette espèce très particulière de bisous, descriptif joyeux et tendre de leurs us et coutumes, caractère et comportement… petits exercices d’entraînement pour mieux les envoyer… au final vous saurez Tout (ou presque) sur les bisous volants !
⧫⧫⧫⧫⧫⧫
Partage
« C'est peut être le mot le plus important de la liste. Si on réfléchit bien, je trouve que les histoires, les livres, les spectacles, le métier que j'exerce, qui est d'illustrer des histoires, n'a de sens qu'à partir du moment où ces histoires seront partagées. Finalement, l'objet, qui est un livre, n'est pas autre chose que l'espace d'un partage entre les histoires inventées qui partent de la tête d'un auteur, quelque part dans le monde, et un lecteur qui va faire entrer en lui cette histoire par le biais du livre. Et cet espace de partage est extrêmement vaste. C'est fou ce qu'on peut y mettre et comment ça peut se remplir, cet espace... (…) Un livre peut arriver entre les mains de quelqu'un extrêmement éloigné de soi. »
Peter Pan
Merci pour ces belles paroles !
Biographie :
Régis Lejonc fait partie de la génération révélée par les éditions du Rouergue au début des années 90. Il a publié chez de nombreux éditeurs depuis, s'est lancé dans l'écriture de textes d'albums pour la jeunesse, dans la direction de collections et s'essaye également au graphisme de temps à autres. Régis Lejonc est un touche-à-tout, un illustrateur inclassable qui passe d'un univers graphique à un autre au gré des livres, appréciant autant l'influence de l’art nouveau, des grands peintres impressionnistes, des affichistes des années 40 et 50 que celle des kawaï japonais.
Le jardin du dedans-dehors |
Le jardin du dedans-dehors |
Bibliographie sélective :
Le jardin du dedans-dehors,
Chiara Mezzalama, éd. des éléphants, 2017, prix Sorcières 2018, catégorie Carrément beau maxi
Cœur de bois, texte de Henri Meunier, éd. Notari, 2016, prix
Carrément Sorcière Fiction
Khodja, texte de Thomas Scotto, éd. Thierry Magnier, 2015
La Promesse de l'ogre, texte Rascal, éd. L'École des Loisirs, coll. Pastel, fév. 2015
La Poupée de Ting-Ting, texte de Ghislaine Roman, éd. Seuil Jeunesse, janvier 2015
L'arbre de paix |
Le Bestiaire fabuleux, texte Maxime Derouen, éd. Gautier-Languereau, 2013
L'Arbre de paix, texte Anne Jonas, éd. Père Castor-Flammarion, 2013
Le Lac des cygnes, adapté et raconté par Élodie Fondacci, éd. Gautier-Languereau, 2012
Le Dragon d'étoiles, conte tzigane écrit par Jean-Jacques Fdida, éd. Didier Jeunesse, 2011
Obstinément chocolat, texte Olivier Ka, éd. L'Édune, 2011
La Rue qui ne se traverse pas, texte Henri Meunier, éd. Notari, 2011, 2015
L'Arbre et l'Enfant, Jean-Luc Coudray, éd. L'Édune, 2011
Le bestiaire fabuleux |
Le Golem, Anne Jonas, éd. Nathan Jeunesse, 2010
La Carotte aux étoiles, ill. Riff Reb's, d'après une histoire originale de Thierry Murat, La Gouttière, 2010 – rééd. : L'École des loisirs, coll. Mille bulles, 2014
Quelles couleurs !, éd. Thierry Magnier, 2009, 2014
Un an, un jour, images Carole Chaix, histoire Régis Lejonc, photographies Aimery Chemin, éd. Atelier du poisson soluble, 2009
U-V, Régis Lejonc, postface Henri Meunier, éd. L'Édune, 2008
Elvis, texte Régis Lejonc, ill. Christophe Alline, éd. Didier jeunesse, 2008
L'Oiseau et la Bille, Jean-Daniel Lainé, éd. L'Édune, 2006
Hans le balourd, Hans Christian Adersen, adaptation Alain Serres, éd. Rue du Monde, 2005
La Mer et Lui, texte Henri Meunier, éd. du Rouergue, 2004 – rééd. Notari, 2013
L’Oiseau de vérité, conte musical de Jean-Jacques Fdida, éd. Didier Jeunesse, 2004, 2010
Ma voisine est amoureuse, éd. Thierry Magnier, 2003 – rééd. Actes Sud junior, 2015
Le Cri, Henri Meunier, éd. du Rouergue, 2003
La Môme aux oiseaux, Henri Meunier, éd. du Rouergue, 2003
Helena, Ivan et les oies, Muriel Bloch, éd. Didier Jeunesse, 2002
Marabout d’ficelle, Sébastien Joanniez, éd. du Rouergue, 2002
L’Arbre qui pense, Raymond Queneau, éd. Rue du Monde, 2002
Le Fabuleux Fablier, anthologie Jean-Marie Henry, éd. Rue du Monde, 2001
Ange, Annie Agopian, éd. du Rouergue, 1998
Icare, Olivier Douzou, éd. du Rouergue, 1996 (épuisé)
Tour de manège, Olivier Douzou, éd. du Rouergue, 1995